B. Durant l’Entre-deux-guerres, le commerce se contracte

 

1) Au lendemain de la 1° GM

Hormis la GB, tous les autres pays demeurent protectionnistes avec des droits de douanes conséquents qui bloquent les échanges mondiaux et la croissance.

Pendant la Première Guerre mondiale, les exportations en direction de l’Europe ont augmenté (rigidité de l’offre de produits agricoles européens due au conflit). Mais une fois le conflit terminé, les Européens sont à nouveau capables d’assurer leurs approvisionnements. Les débouchés américains diminuent donc.

Les États-Unis adoptent alors en 1922 un protectionnisme douanier très dur (Tarif Fordney-Mac Cumber) et les Européens réagissent par des mesures de rétorsion (protectionnisme en représailles).

 

2) Avec le déclenchement de la crise de 1929

 

* Aux E-U, les échanges se contractent mécaniquement avec la chute de la production

Les Etats-Unis adoptent des mesures protectionnistes sévères afin de réserver les débouchés aux entreprises nationales. C’est le tarif Hawley-Smoot (1930), très agressif vis-à-vis des autres pays :

  • Droits de douane de 49 % sur les produits agricoles !
  • Droits de douane de 34 % sur les autres produits !

Cette stratégie revient à essayer de reporter les problèmes sur les pays étrangers : les Etats-Unis, pour se réserver les débouchés intérieurs, achètent moins aux autres pays, donc, ils réduisent les débouchés de ces pays, donc le niveau d’activité et d’emploi de ces derniers. Au total, les Etats-Unis exportent leur crise dans le reste du monde.

La diffusion internationale de la crise américaine (spontanée ou volontaire [protectionnisme]) provoque des difficultés dans de nombreux pays.

 

Ce qui se retourne contre les EU : ces pays sont moins à même d’importer des produits américains. Par conséquent, une partie des débouchés extérieurs des EU disparaît, ce qui aggrave la crise de demande déjà forte en interne et accentue la dépression aux EU.

 

* En G-B

Depuis la fin de la 1° GM, la GB mène une politique de déflation destinée à faire s’apprécier la livre sterling de manière à retrouver sa parité or d’avant-guerre ; ce qu’elle obtient en 1925.

Elle continue sa politique de déflation pour défendre sa parité-or y compris durant la crise, ajoutant la déflation à la déflation pour des raisons externes. En 1931, c’est intenable et la GB renonce à la parité-or de la livre : elle flotte et se déprécie. La dépréciation (- 30%) constitue une mesure de protectionnisme monétaire.

 

Elle adopte le dispositif de la « Préférence impériale » (accords d’Ottawa, 1931) : Le protectionnisme douanier est rétabli à l’égard de tous les pays étrangers, sauf à l’égard des colonies (Empire), désormais regroupés dans une ensemble baptisé Commonwealth. Les pays de l’Empire britannique s’accordent mutuellement un traitement préférentiel dans leurs rapports commerciaux avec les pays tiers (pas de droits de douane entre eux) => « préférence impériale ». Ces pays constituent donc entre eux une zone de libre-échange. C’est le repli sur l’Empire. La Grande-Bretagne et les pays du Commonwealth sortent de la crise par une stratégie non coopérative de protectionnisme monétaire et douanier vis-à-vis des pays non membres du Commonwealth. Cela reporte les problèmes sur l’étranger. C’est le reproche que leur fait à l’époque l’économiste britannique Joan Robinson en la qualifiant de « politique d’appauvrissement du voisin » (« beggar my neighbour »). Le redressement se fait en reportant les problèmes d’activité et d’emploi sur les partenaires commerciaux (stratégie d’exportation du chômage).

 

* En Allemagne, après l’hyperinflation de 1923 qui a vu la dévaluation du mark, l’Allemagne subit à son tour la dépréciation de la livre (- 30%) : les produits allemands sont moins compétitifs et les exportations allemandes reculent fortement. La production industrielle chute de 30% et le chômage décolle.

 

Elle riposte par un très sévère relèvement des tarifs douaniers quasi prohibitifs :il s’agit de rendre les produits étrangers plus chers dans le pays pour limiter les importations et ainsi s’assurer des débouchés intérieurs en relevant des droits de douane. C’est un échec : les exportations ont du mal à regagner en compétitivité et sont, de toute manière, handicapées par la contraction générale des échanges : de 1929 à 1934, les exportations allemandes baissent de 70 % ! C’est le repli sur le Reich et la quasi-autarcie.

 

* Aux Etats-Unis, des contingentements s’ajoutent alors aux droits de douane ; les EU se lancent dans le protectionnisme monétaire en suspendant la convertibilité–or du dollar et en dévaluant celui-ci de 41% par rapport à l’or en réponse à la dépréciation de la livre. Les E-U rentrent dans une phase isolationniste dont ils ne sortiront qu’avec Pearl Harbor.

 

Nous sommes en plein dans la spirale dépressive des dévaluations compétitives. La crise s’approfondit.

 

* En France dans le même temps, le franc qui se dépréciait après-guerre a été stabilisé en 1928 par Poincaré.

Mais le solde du commerce extérieur se dégrade à la suite des mesures protectionnistes prises par les autres pays (dépréciation de 30 % de la livre (1931), dévaluation de 41 % du dollar (1934), et mesures de protectionnisme douanier allemand.

La France restée accrochée à la parité-or de 1928 est obligée à son tour de dévaluer par trois fois en 1936, 1937 et 1938. Elle se replie elle aussi sur son empire.

 

 

 

Ainsi, la crise et surtout la dépression ont été aggravées, outre les politiques monétaires inadaptées, par le repli protectionniste utilisant tous les instruments disponibles : les contingentements s’ajoutent aux droits de douane prohibitifs jamais vus depuis un siècle ; le protectionnisme monétaire faut rage avec les dévaluations compétitives.

Les grands espaces conservent quelques avantages en se repliant sur les empires

Les pays de plus faible taille ou isolés (Japon, Italie, Allemagne, Europe centrale, Amérique latine) souffrent encore plus : ils manquent de matière premières, de produits énergétiques, de biens d’équipement et réagissent à cet étouffement par une politique agressive et impérialiste pour certains d’entre eux précipitant le monde dans la guerre.

 

Synthèse sur les instruments du protectionnisme

 

Protectionnisme

Tarifaire

Non tarifaire

Douanier

- Droits de douane

 

- Subventions à l’exportation (DD négatifs)

- Quotas

 

- Normes

 

- Restriction volontaire aux exportations

 

Non douanier

- Dévaluation/dépréciation du taux de change (protectionnisme monétaire)

 

- Fiscalité (ex : TVA dite « sociale »)

 

- Restriction d’accès aux marchés publics

 

- Réglementations diverses