b) Les formes de la monnaie

Les connaissances actuelles permettent d’invalider la thèse comme quoi la monnaie aurait succédé au troc et serait apparue pour permettre le développement du commerce pour des raisons de commodité (argument développé initialement par C. Menger, 1871).

Les sociétés de chasseurs-cueilleurs nomades semblent être les seules à ne pas avoir connu la monnaie. Les premières formes de monnaie seraient apparues cinq mille ans avant notre ère. L’argent, le cuivre, l’or, les coquillages, le bétail, le grain, les fers de hache et bien d’autres sortes de marchandises que les spécialistes qualifient de « monnaies primitives » ont rempli cette fonction dans les différentes régions du monde. Il s’agissait de monnaies sans capacité d’échange, nées dans le tissu de relations sociales bien éloignées des simples préoccupations commerciales. « La particularité propre à l’ensemble des biens achetés par la monnaie primitive est que ce sont des biens associés à la personne. La monnaie primitive sert à assurer un trafic sur les personnes. Mais elle ne sert que très peu au commerce des choses. » A. Testart. Mariage, amende, compensation pour insulte, paiement d’un tueur à gage, cadeau au chef, dot, prix des filles à marier, etc.

 

1/ La monnaie au sens strict

Les biens ont une destination particulière plus ou moins étroite, par contre, une somme de monnaie n'a aucune destination particulière : elle permet d'obtenir immédiatement n'importe quelle contrepartie ( si elle est disponible…), de régler immédiatement une dette : il s'agit des moyens de paiement, de la monnaie au sens étroit. En ce sens, la monnaie est liquide. On dit quelle est la liquidité par excellence : elle permet une infinité de possibilités. On dit encore qu'elle est porteuse de choix.

C’est ici la monnaie au sens strict, les moyens de paiement immédiats détenus par les agents non financiers résidents et directement utilisables dans les transactions. C'est le cas des pièces, des billets et des soldes créditeurs de dépôts à vue.

 

a/ La monnaie métallique

Aujourd’hui disparues, les pièces en métaux précieux (or et argent) depuis 2000 ans avant notre ère en Égypte semble-t-il. Depuis 1914, ce type de pièces ne circule plus : avec la démonétisation de l’or, les pièces d’or antérieures à 1914 n’ont plus cours légal (leur fonction de moyen de paiement n’est plus reconnue par la loi). Elles sont utilisées comme bijoux, objets de collection, valeur-refuge…).

Les monnaies divisionnaires : ce sont des pièces constituées de métaux vulgaires (cuivre, nickel). Actuellement, ce sont de simples divisions commodes des billets de banque.

b/ Les billets de banque

À l’origine, il s’agit de certificats de dépôt d’or dans une banque quelconque. Un billet est donc un titre de créance sur une banque qui reconnaît avoir reçu en dépôt une certaine quantité d’or et s’engage à le restituer contre remise du billet (billet convertible en or). Le porteur du billet a confiance dans la capacité de la banque à lui restituer son or. On parle de monnaie fiduciaire (en latin « fiducia » signifie confiance) à propos des billets de banque.

 

Par la suite, des instituts d’émission sont crées et ont le monopole de l’émission sur le territoire national (Donc au XIX° siècle, siècle du fait national). Exemple : la Banque de France est crée en 1800 comme Institut d’émission des billets dont elle a le monopole. Ils donnent à l’époque le droit à obtenir de l’or (convertibilité-or des billets).

 

Depuis 1914, avec la 1° GM, les banques centrales décrètent l’inconvertibilité des billets en or : ils ont cours forcé de façon définitive en France depuis 1936. À compter de 2002, les billets en euro remplacent ceux en francs.

c/ La monnaie scripturale

Forme prépondérante dans les économies occidentales, elle est constituée par les soldes créditeurs des dépôts à vue dans les banques, la Banque de France, le Trésor public et les Caisses d’épargne. Cette forme monétaire à des origines lointaines comme l'atteste l'emploi du paiement par écriture entre les marchands dès le XIII° siècle. Rapidement, elle se développe sous la forme de l'escompte d'effets de commerce circulant entre négociants.

Aujourd'hui, les sommes déposées sur des comptes sont inscrites dans les livres de comptes des banques : c'est le sens de la monnaie scripturale. Les sommes déposées peuvent être retirées sans préavis, au vu de l'ordre de retrait. Les dépôts sont mobilisés par simple jeu d'écriture : la somme déposée en banque est indisponible, immobilisée. Le déposant en recouvre la disponibilité, l'utilise, la mobilise.

La particularité est que pour circuler, cette forme de monnaie a besoin d’instruments de circulation de la monnaie scripturale

Des instruments traditionnels

  • Le chèque : document par lequel le titulaire du compte donne ordre à sa banque de payer une certaine somme à une tierce personne (le bénéficiaire).
  • Le virement : transfert direct de compte à compte

Des instruments plus récents

  • L’avis de prélèvement : le principe est que le titulaire du compte autorise un de ses créanciers à prélever régulièrement une somme directement sur son compte bancaire. Une variante est le titre interbancaire de paiement (TIP) : le titulaire du compte doit donner son accord à chaque prélèvement.
  • Les cartes de paiement : à débit immédiat ou à débit différé.
  • Les instruments électroniques : paiement par Internet

(Il ne faut pas confondre la monnaie scripturale (les soldes créditeurs de dépôts à vue) et les instruments de circulation de la monnaie scripturale : un chèque n’est pas de la monnaie mais un moyen de la faire circuler).

2/ La monnaie au sens large

D'autres actifs ne permettent pas un règlement immédiat mais ils peuvent néanmoins être transformés en moyens de paiement facilement et rapidement, sans risque de pertes en capital. Il s'agit de certains placements. Ainsi, une somme placée sur un livret A des Caisses d'épargne ne permet pas directement un règlement mais elle peut être transformée en moyen de paiement aux deux conditions ci-dessus. On indique que ces actifs sont facilement monétisables, ils ont un degré de liquidité élevé. On les a inclus dans les actifs monétaires en opérant cependant des distinctions entre eux selon qu'ils sont plus ou moins facilement transformables en moyens de paiement. On s’intéresse alors plus à la capacité de dépense des agents qu’aux seuls moyens de règlement qu’ils détiennent.

a/ Des placements très liquides mais non négociables

On ajoute une première catégorie de placements particulièrement faciles à monétiser.

 

Les dépôts avec préavis inférieur ou égal à trois mois : sont regroupés les placements à vue à taux réglementés, non mobilisables par chèques, effectués auprès des Établissements de crédit et du Trésor Public. Ces placements sont non négociables, ils ont une forte liquidité et ne comportent pas de risques de perte en capital.

  • Livret A des Caisses d’épargne, le livret bleu du Crédit mutuel
  • Les Livret de développement durable (ex-CODEVI)
  • Les livrets d’épargne populaire
  • Les comptes Epargne logement
  • Les livrets jeunes
  • Les livrets bancaires
  • Les dépôts à terme d’une durée initiale inférieure ou égale à deux ans non négociables : ils reçoivent sans plafond une somme bloquée pour une durée déterminée ; un compte distinct est ouvert pour chaque opération de placement. La rémunération et les intérêts sont fiscalisés. Non négociables, le titulaire peut néanmoins disposer de ses fonds avant terme moyennant une pénalité.

b/ Des placements encore assez liquides et négociables

On ajoute une deuxième catégorie de placements (désignés par M3 – M2) dont la caractéristique commune est de représenter une monétisation plus délicate que précédemment.

  • Les titres d’OPCVM monétaires (organisme de placement collectif en valeurs mobilières)
  • Les titres de créances émis d’une durée inférieure à deux ans
  • Les instruments du marché monétaire (certificats de dépôts + billets de trésorerie)
  • Les pensions (espèces perçues en contrepartie de titres vendus lors de refinancement sur le marché interbancaire).

Tous ces actifs ont un degré élevé de liquidité : cela en fait de proches substituts des dépôts.