1) La gestion optimale des ressources environnementales

 

a) La Règle de Hotelling (1931)

C’est à la base un problème d’exploitation optimale du stock disponible d’une ressource finie traité sous la forme d’un arbitrage entre usage présent et usage futur. C’est un choix intertemporel qui dépend de la préférence pour le présent ou le futur.

 

A mesure que la ressource s’épuise, le prix croît de manière exponentielle, pour tendre vers l’infini lorsque le stock de la ressource rare tend vers zéro : il n’y a donc jamais épuisement total de la ressource rare. Le signal prix joue un rôle clé incitatif : les producteurs anticipant un prix futur pus élevé freinent l’exploitation, les demandeurs dissuadés par la montée des prix et incités à se tourner vers des substituts.

 

Le capital naturel fournit des services, génère des revenus et représente en lui-même une valeur d’existence. En ce sens, la soutenabilité se définit comme la capacité à maintenir au moins constant la valeur de ce capital naturel afin de préserver le bien-être des générations futures.

 

Ainsi, deux types de ressources sont « offertes » aux hommes par la nature, selon leur renouvelabilité :

  • En ce qui concerne les ressources naturelles renouvelables (le bois, les ressources halieutiques…), la règle est assez intuitive : le rythme de prélèvement ne doit pas excéder le rythme de renouvellement de la ressource . Il s’agit en effet d’éviter toute surexploitation qui viendrait entamer la valeur de ce capital naturel et réduire les flux ultérieurs de revenus. Le strict respect de cette règle de « bonne gouvernance » des ressources doit permettre d’éviter les déforestations massives et les prélèvements excessifs de poisson.
  • En ce qui concerne les ressources naturelles non renouvelables, la règle est la suivante : le rythme de prélèvement ne doit pas dépasser le rythme de découverte de substituts à cette ressource. Par exemple, l’exploitation de pétrole doit s’accompagner d’investissements dans la recherche-développement afin de favoriser la découverte d’énergies alternatives. Plus précisément, la Règle de Hartwick (1977) préconise de réinvestir intégralement la rente tirée de l’exploitation du capital naturel dans du capital productif afin de diversifier les revenus et être capable de faire face à l’épuisement inexorable de la ressource.

 

b) … Et sa mise en œuvre concrète

C’est ainsi que certains pays producteurs de pétrole se sont dotés de Fonds souverains particulièrement actifs en termes d’investissement à l’étranger. On pense notamment à Abou Dhabi, au Qatar ou encore à la Norvège. Le respect strict de cette règle doit permettre d’échapper à la maladie hollandaise (ou malédiction de la rente), dont sont victimes les pays abondamment dotés en ressources naturelles

 

(La maladie hollandaise, ou Dutch disease fut observée dans les années 1960 aux Pays-Bas suite à d’importantes découvertes de gaz. Au-delà des retombées immédiates, le pays a finalement connu une détérioration de sa compétitivité, nuisible à l’ensemble de l’économie. Ce syndrome hollandais peut se généraliser à tout pays richement doté ressources naturelles).

 

Toutefois, la distinction entre ressource renouvelable et non renouvelable reste assez ténue. En effet, une ressource renouvelable qui serait surexploitée devient rapidement non renouvelable. Inversement, le stock d’une ressource considérée comme non renouvelable peut être sensiblement revu à la hausse si de nouvelles techniques d’extraction permettent d’avoir accès à des réserves supplémentaires. On pense notamment aux gaz de schiste ou aux sables bitumeux ou plus simplement à la découverte de nouveaux gisements.

 

Reste la force des incitations par le signal prix.

 

2) La nature des biens environnementaux et la question des institutions gestionnaires

Le coût supporté par celui qui utilise les ressources naturelles est un angle essentiel pour l’analyse économique.

Si la question de l’usage d’un bien comme une baguette de pain apparaît nette, il n’en va pas de même pour d’autres biens, environnementaux en particulier.
Les biens privés envisagés dans les chapitres précédents ont pour caractéristiques d’être rivaux et avec exclusion.

  • Ils sont rivaux car leur usage par un consommateur réduit les possibilités de consommation par les autres consommateurs. Le coût de production est directement lié à la quantité produite et au nombre d’unités consommées.
  • Ils sont avec exclusion car un paiement direct est exigé et tout consommateur qui n’est pas disposé à payer est exclu

Face à cela, un programme de défense nationale, un programme de télévision, une piscine municipale, l’éclairage des rues : voilà des exemples de situations posant de nouvelles questions à l’analyse microéconomique.
Si l’on croise ces deux critères présentés supra, on peut bâtir une typologie (P. Samuelson (1954) .

 

Exclusion

Non-exclusion

 

Rivalité

 

Biens privés purs

 

 

Biens communs    (Commons)

 

Non-rivalité

 

Biens collectifs impurs (biens à péage ou biens de club)

 

 

Biens collectifs purs

(Public goods)

 

 

  • La non-rivalité signifie que la consommation d’un bien par un individu ne diminue pas la consommation possible des autres. On peut dire ainsi qu’il n’y a pas d’effet d’encombrement, c'est-à-dire de situations où l’utilité qu’un agent retire de la consommation du bien se trouve réduite à cause de la consommation par d’autres. Exemple : Bouchons routiers.…
  • La non-exclusion signifie que l’usage du bien par quiconque ne peut empêcher son usage par un autre, comme c’est le cas de l’éclairage public. Cela constitue un obstacle majeur à la production privée puisqu’il n’est pas possible d’exclure les consommateurs par le prix : le marché repose bien sur un principe d’exclusion (par l’a disposition à payer)


Les biens environnementaux relèvent plutôt de la catégorie des Communs :

  • Non exclusifs telles l’atmosphère terrestre, les ressources halieutiques, la biodiversité, … Rivaux


Lorsque l’accès aux ressources naturelles est libre, la logique de l’action collective telle qu’exposée par M. Olson (1965) risque fort de s »’imposer ; c’est ce que G. Hardin (1968) a qualifié de »tragédie des communs » avec les comportements de passager clandestin. Profiter des avantages sans vouloir en supporter les coûts pousse à l’épuisement de la ressources (ex des communaux, pâturages et bois, avant la révolution agricole).
La gestion privée par la privatisation de la ressource est alors une solution : Hardin met en avant la privatisation des terres et des pratiques culturales comme cause majeure de l’élévation de la productivité agricole lors du décollage de l’Angleterre au XVII° siècle
(cf.; les eaux territoriales, les zones économiques exclusives ou les droits de propriété privée échangeables et les quotas d’émission de CO2).