B.  Plusieurs dimensions à concilier


1) Concilier l’économie, le social et l’environnement

L'objectif du développement durable est de définir des schémas qui concilient les trois aspects économique, social, et écologique des activités humaines : « trois piliers » à prendre en compte par les collectivités comme par les entreprises et les individus. La finalité du développement durable est de trouver un équilibre cohérent à long terme entre ces trois enjeux. A ce triptyque s'ajoute un enjeu transversal : le caractère intergénérationnel par la prise en compte du temps irréversible (cf. définition du développement durable en termes d’équité intergénérationnelle du Rapport de la Commission Brundtland).

 

La recherche du développement durable peut donner lieu à une présentation en termes d’objectifs à atteindre. Cette présentation graphique peut constituer une grille de lecture commode pour identifier les différentes stratégies possibles en matière de croissance et de développement.

La recherche du développement durable peut donner lieu à une présentation en termes d’objectifs à atteindre. Cette présentation graphique peut constituer une grille de lecture commode pour identifier les différentes stratégies possibles en matière de croissance et de développement.

Il paraît difficile de concilier prospérité économique, justice - progrès social et protection de l’environnement ; d’où la tentation de privilégier tel ou tel aspect, c’est-à-dire de s’orienter vers l’un des sommets au détriment d’au moins un autre.
- Par exemple, la recherche « stakhanoviste » de la croissance au service de l’édification d’un monde débarrassée des inégalités entre les hommes peut conduire à négliger totalement l’environnement, comme ce fut le cas à travers le modèle soviétique .  

- Dans une version moins radicale comme celle du Welfare state, la protection sociale se nourrit d’une croissance vigoureuse, à l’image de la croissance fordiste des Trente Glorieuses. Là aussi, les préoccupations à l’égard de l’environnement ont été reléguées au second plan, l’objectif prioritaire étant de ne pas brider la croissance afin de poursuivre la marche vers le progrès social.   

- La promotion d’une croissance verte, c’est-à-dire permettant de concilier dynamisme économique et respect de l’environnement, peut soulever des problèmes redistributifs et créer de nouvelles inégalités. Si l’on suppose par exemple que les énergies vertes (propres) seront plus onéreuses que les énergies fossiles (sales), la facture énergétique risque de s’élever considérablement pour les ménages les plus pauvres, ceux-ci pouvant basculer dans la précarité énergétique. De même, une taxe carbone permettrait de réduire certaines consommations jugées nocives pour l’environnement, mais au prix d’une baisse de pouvoir d’achat surtout pénalisante pour les catégories les plus modestes.

- Enfin, les partisans de la décroissance considèrent que la recherche effrénée de la croissance accentue les inégalités et détériore irrémédiablement la planète. Dans ce cadre, c’est donc la croissance qu’il convient de « sacrifier sur l’autel de l’environnement et de la justice sociale ».


2) Concilier économique, social, environnement et démocratie

On vient de le souligner, il paraît difficile de concilier simultanément les trois objectifs prônés par le développement durable, du moins à court terme.
La configuration devient plus problématique encore si l’on ajoute une dimension supplémentaire, celle du respect de la volonté démocratique. Cette question sensible pourrait se formuler ainsi : La recherche du développement durable est-elle compatible avec la démocratie ?

Pour certains auteurs , le temps long des problématiques du développement durable s’accommode mal avec l’horizon court-termiste des échéances électorales. De même, tous les électeurs ne sont pas nécessairement des citoyens éclairés, altruistes vis-à-vis des générations futures et soucieux de la préservation de l’environnement. Ceci est d’autant plus vrai que les politiques visant à la sauvegarde de la planète peuvent être perçues comme coûteuses et attentatoires à la liberté individuelle de se déplacer ou de se distraire, d’où les craintes vis-à-vis d’une écologie punitive voire d’une « dictature verte ». Certaines formes « d’éco-résistance » commencent même à se manifester dans certaines franges de la société française .

Par exemple, le champ des libertés individuelles serait particulièrement restreint s’il était octroyé à chaque individu un quota intangible d’émission de GES à ne pas dépasser, et ce quel que soit le niveau de revenu. Quelle serait l’acceptation par les citoyens d’une telle mesure « autoritaire », qui aurait pourtant le mérite d’être parfaitement égalitaire ?

Ainsi, pour être légitimée par le plus grand nombre, la recherche du développement durable doit s’inscrire dans le périmètre démocratique, d’où la nécessité de promouvoir une démocratie animée par des citoyens éclairés  et donc parfaitement informés des enjeux sociaux et des problématiques environnementales.

 

C. Durabilité -soutenabilité faible / forte

 

1) La durabilité « faible » s’apparente au paradigme néoclassique

Suivant l'approche néoclassique, les ressources naturelles apparaissent comme des facteurs de la richesse nationale et de la croissance. Le capital naturel aussi bien que le capital humain doivent être traités de la même manière que le capital physique, car tous trois sont parfaitement substituables. En effet, le capital naturel, même s'il est intrinsèquement irremplaçable, n'a de valeur pour l'homme que par les services qu'il lui rend. Le progrès technique, qui permet de repousser les limites de la croissance économique, résout aussi les problèmes sociaux et environnementaux. Les mécanismes de marché, guidés si nécessaire par une politique environnementale, assurent alors une gestion efficace du capital naturel.
Les instruments économiques permettent de dépasser la logique de court terme des agents, et le développement durable consiste à conserver la capacité globale des sociétés humaines à augmenter la production et le bien-être. Exemples de substituabilité entre les différentes formes de capital :

  • L’épuisement des ressources en eau potable (capital naturel) peut être compensé pour les générations futures par l’installation d’usines de dessalement (capital physique)
  • L’épuisement des réserves en pétrole (capital naturel) peut être compensé par des recherches (capital humain) permettant des économies d’énergie ou la découverte d’énergies de substitution